Qu’est-ce que le burn-out parental ?
C’est un syndrome d’épuisement qui résulte d’un déséquilibre important ET prolongé entre les demandes qui pèsent sur l’individu et les ressources dont il dispose.
Ce syndrome a des conséquences physiques, psychologiques et émotionnelles chez le parent qui n’en peut plus ! La liste des symptômes est longue : il-elle se sent dépassé-e, épuisé-e et son corps finit par lâcher, le parent peut avoir des pensées violentes envers son ou ses enfants, soudain taper ou crier sur son enfant alors que ce ne sont pas ses valeurs et entraîner le fait que soudain le parent ne se reconnait plus ! Cela induit une perte d’épanouissement et d’efficacité parentale marquée comme un contraste avec sa vie d’avant. Si la situation perdure et que le déséquilibre dure trop longtemps, le corps finit par lâcher, le parent peut avoir des pensées suicidaires et prendre en détestation son rôle de parent. Il est dans une impasse et ne peut que constater la perte de sens.
Ce trouble de la famille du stress est parfois identifié comme une dépression. Ce n’est pas une dépression c’est une autre forme de mal-être mais cela peut y conduire.
Déceler le burn-out
Le burn-out parental survient quand le stress est trop fort, dure trop longtemps avec pas assez de ressources.
Il est donc important de repérer l’épuisement au plus tôt, de se faire aider par des proches ou des professionnels et d’entrer dans la compréhension du phénomène du burn-out parental pour en sortir et retrouver le plaisir d’être parent. Le burn-out parental est une forme particulière du burn-out qui atteint un individu uniquement dans son rôle de parent. Le burn-out parental est moins connu que le burn-out professionnel simplement car il a été plus récemment reconnu et diagnostiqué.
C’est dans les années 80 que l’on a observé et formalisé le burn-out professionnel. Et ce n’est qu’en 2015 que Moïra Mikolajczak et Isabelle Roskam, en Belgique, ont prouvé l’existence du burn-out parental. Si le phénomène est récent, il n’en est pas moins répandu et on considère aujourd’hui que entre 5 et 9% des parents pourraient être en burn-out !
La réponse sociétale française est presque inexistante pour différentes raisons.
Tout d’abord, c’est une manifestation qui agit dans l’ombre de la solitude, de la culpabilité et de la honte de ne pas être le parent idéal que l’on a rêvé d’être. Le parent qui est au bord du burn-out l’identifie rarement seul. Il se rend compte d’une souffrance, d’un mal-être, d’un changement de personnalité mais ne se sait pas en burn-out. C’est souvent le regard d’un-e autre qui peut l’aider à prendre conscience de son état. Alors, dans son désarroi, il tait sa peine.
Par ailleurs, il y a une telle méconnaissance du phénomène que l’on confond parfois burn-out et dépression. Mais ce sont deux troubles différents. Le burn-out est un épuisement lié à une sphère de vie qu’elle soit professionnelle ou personnelle. Par exemple, quand le parent en burn-out n’est pas au contact de son enfant, il se sent bien et peut être connecté à sa vitalité. Alors que la dépression et ses symptômes (humeur triste, vide et perte de plaisir…) concernent toutes les sphères de la vie. Le burn-out peut mener à la dépression s’il n’est pas pris en charge.
Il n’existe à l’heure actuelle, à ma connaissance, aucune formation certifiante en France sur le sujet du burn-out. Voilà pourquoi je suis allée suivre la formation sur la prise en charge du burn-out en Belgique à l"Académie Burn-out", seule formation certifiante en Europe sur le burn-out professionnel et parental ! Dira-t-on assez que les belges ont une ouverture d’esprit et une créativité qui leur donne souvent des places d’avant-gardistes…
Les facteurs de risque
Palo Alto nous confirme que le comportement est le résultat du dedans et du dehors.
Les facteurs favorisant le burn-out sont intérieurs et extérieurs mais d’une manière générale, ils sont essentiellement dus à un mode de société occidental prônant des valeurs de responsabilité et d’exigence envers l’individu qui sont loin de la bienveillance. Le burn-out est devenu une pathologie de civilisation. Pour preuve, il y a 10 fois plus de cas de burn-out dans les pays d’Europe qu’en Afrique.
Etre parent aujourd’hui, c’est marcher sur une ligne de crête.
Pour ce qui concerne les facteurs extérieurs du burn-out parental, on peut remarquer l’évolution de la présence de l’enfant dans la société. Avec le temps la place de l’enfant a considérablement évolué en passant, pour faire très court et en parcourant l’histoire avec des bottes de 7 lieues, d’objet parental, le parent ayant le droit de vie et de mort sur son enfant, à sujet à part entière. La Convention des Droits de l’Enfant de 1989 votée par l’Assemblée Générale des Nations Unies stipule : “Les États parties conviennent que l’éducation de l’enfant doit viser à favoriser l’épanouissement de la personnalité de l’enfant et le développement de ses dons et de ses aptitudes mentales et physiques, dans toute la mesure de leurs potentialités.” . L’enfant a glissé d’un rôle subalterne à un rôle central dans les préoccupations de l’État mais aussi dans les affaires familiales.
Cela nous amène à considérer les causes intérieures et individuelles du burn-out. Le parent reçoit, à son insu parfois, des injonctions sociétales à “réussir” sur tous les plans. Réussir sa vie personnelle, réussir sa vie professionnelle, réussir son couple, réussir son ou ses enfants… Cela peut engendrer frustration et écueils divers. Particulièrement pour les plus perfectionnistes ! “On” dit que le burn-out est une maladie des paresseux. Ce sont au contraire les personnes les plus motivées, les plus perfectionnistes et les plus investies que l’on découvre assujetties au burn-out, que ce soit burn-out parental ou professionnel.
Mon burn-out parental
En 2019, j’ai suivi la formation de l’ « Académie Burn-Out » créée par Moïra Mikolajczak et Isabelle Roskam en Belgique. Ces deux universitaires et chercheuses ont créé cette formation pour enseigner la prise en charge aux professionnels confrontés au burn-out professionnel et/ou parental. Et c’est au cours de cette formation et lors de l’expérimentation et de l’application d’exercices et de tests sur le burn-out parental que j’ai soudain réalisé que, moi aussi, j’ai vécu un burn-out parental !
Mon histoire personnelle avec le burn-out parental est malheureusement trop commune. Mon mari reçoit une promotion à 2000 kms de notre résidence où j’ai établi un solide réseau amical nourri d’activités passionnantes. J’accepte que nous partions ensemble dans ce pays dont je ne connais même pas la langue. Loin de ma famille, sans travail avec un mari absent car très pris par son nouveau travail, je gère le quotidien avec mes quatre fils. La joie de la découverte d’un lieu et d’une culture nouvelle, au fil des mois, s’estompe pour laisser place à la lourdeur de n’être réduite qu’à un rôle, celui de m’occuper des enfants. C’est devenu lourd, très lourd. La lourdeur fit place à la tristesse, qui insidieusement me soufflait à l’oreille : « Mais que se passe-t-il ? » « Quel sens donner à cette vie ? » Je ne me comprenais plus ; d’un côté, j’avais à cœur d’être là pour le développement de mes enfants, les épauler, être disponible pour eux… en bref, d’être là pour leur donner les moyens d’une enfance libre et épanouie (ce que je n’avais pas reçu personnellement). De l’autre côté, je me sentais vide, épuisée, sans énergie… Je ne pouvais plus y arriver. Je suis devenue irritable ; je criais, m’emportais, et ne pouvais plus me contenir. Les enfants se plaignaient de ma manière d’être auprès de leur père « Papa, Maman m’a dit des méchantesses ». C’était vrai. Je me sentais une mauvaise mère, ce qui m’était insupportable. Petit à petit, la tristesse fut remplacée par la honte. Seule, tellement seule sans savoir quoi faire, je me trouvais dans un état de « déréliction » (sentiment de solitude et d’abandon intense) diraient les experts. En même temps que la honte s’est installée la culpabilité. Coupable de ne pas y arriver. Mes enfants étaient là, pleins de vie… pendant que moi, je me sentais de plus en plus vide. J’avais cette impression étrange et progressive qu’au plus ils avaient de l’énergie, moins j’en avais. Plus ils s’en remplissaient, plus je m’en vidais.
J’ai commencé à me détacher d’eux… à instaurer malgré moi de la distance, du désintérêt. Où était passé cet attachement charnel à la chair de ma chair, l’amour pour eux, pourtant si fort avant ? Les reproches, l’amertume, la colère… ont pris le relais. Je me voyais sombrer… En m’écoutant, un docteur me conseille un médicament contre la dépression, je réagis, je m’insurge, mais pourquoi me propose-t-elle cela ? Puis, j’admets. Je ne vais pas bien. Un peu prise en étau, j’accepte de rentrer dans cette réalité. Je me vois tout à coup en train de couler dans un mouvement de spirale que rien n’arrête. Je me vois en train de me détruire, de nous détruire. Je me dis que si je ne fais rien, je vais mourir. Il me semble bien aujourd’hui que la prise de conscience s’est faite au travers du regard de cette professionnelle. Un sursaut de vie me fait prendre conscience que je dois m’en sortir, me battre pour rester en vie. Tout à coup, surgit l’évidence que cela doit passer par le corps et le mouvement. Je choisis donc de revenir dans ma région de résidence et de démarrer une formation de sophrologie puisque c’est le corps qui a lâché. Avec le temps, je verbalise mon vécu, ainsi que la charge mentale et émotionnelle qui m’accompagnaient. Puis vint la renaissance avec sa bouffée d’oxygène. Je redémarre comme à zéro. Tout a un goût différent et est comme neuf. Comme si je réapprenais à parler, à marcher, à vivre. Une nouvelle vie. Une nouvelle manière d’être mère. Une seconde vie dans ma vie. Redéfinie à partir de mes besoins, de mes envies, je me suis finalement laissé la liberté de récupérer les rênes de ma vie.
En revisitant cette époque quelque décennies plus tard, je peux constater que se sont déroulés les facteurs précis de déclenchement du burn-out ainsi qu’ils sont répertoriés par Moïra Mikolajczak : « trop, trop longtemps et pas assez de ressources ». Voilà ce qui a motivé ma formation à la prise en charge du burn-out. D’abord comprendre puis aider les personnes qui risquent d’y être confrontées. Aujourd’hui entre 5 et 9% des parents sont susceptibles de faire un burn-out parental. J’aurais certainement aimé bénéficier, à l’époque,de l’accompagnement que je peux donner aujourd’hui aux personnes qui traversent cette douloureuse période de vie. Il ne faut pas rester seul-e dans cette épreuve, se faire accompagner est une nécessité absolue.